Une équipe de scientifiques de l’EPFL a développé plusieurs biocapteurs qui peuvent aider les centres de soins dans les pays en développement, et même les patients à domicile, à contrôler la concentration de médicaments dans le sang.
Pouvoir surveiller la concentration de médicaments dans le sang d’un patient est un aspect important dans tout traitement pharmaceutique. Toutefois, cela requiert des équipements et des infrastructures qui font souvent défaut dans les centres de soins locaux des pays en développement, tout en portant atteinte à la qualité de vie de patients ailleurs. Des scientifiques de l‘EPFL, ’uvrant au travers de leur start-up Lucentix, viennent de développer un biocapteur lié aux anticorps qui peut suivre la concentration du médicament dans le sang en changeant de couleur. Le biocapteur est incorporé à un système complet qui peut être utilisé sur le terrain ou par le patient à la maison. Les aspects scientifiques de ce travail sont publiés dans Angewandte Chemie .
Le laboratoire de Kai Johnsson à l’EPFL est connu pour développer des biocapteurs, la recherche ayant donné naissance à la start-up Lucentix, qui a développé un biocapteur qui permet aux patients de mesurer facilement les concentrations de médicaments, sans avoir besoin de systèmes de laboratoires complexes.
Le biocapteur est une molécule faite de trois composants: d’abord, une protéine capable de se lier au médicament à contrôler; ensuite, l’enzyme électroluminescente luciférase; et enfin, une molécule de marquage appelée SNAP-tag, qui porte un ligand fluorescent que la protéine (le premier composant) reconnaît et auquel il s’attache lorsque aucun médicament n’est présent. Cela provoque une réaction entre la luciférase et la molécule fluorescente, nommée «transfert d’énergie de résonance à bioluminescence» (BRET), qui produit une lumière rouge.
Cette innovation récente, réalisée par le postdoc Lin Xue, implique le remplacement de la protéine de liaison du biocapteur par une partie d’un anticorps qui a été développé contre le médicament-cible. Lorsque le biocapteur détecte le médicament et s’y lie dans le sang du patient ou dans sa salive, l’anticorps «préfère» s’y lier plutôt qu’au ligand fluorescent SNAP-tag. Comme le ligand est déplacé, la réaction BRET est progressivement interrompue, et émet dès lors une lumière bleue.
Les anticorps sont naturellement capables d’identifier et de se lier à des molécules étrangères, enclenchant notre système immunitaire contre de possibles infections. De plus, générer des anticorps capables d’identifier spécifiquement de petites molécules telles que des médicaments est une procédure de routine. Cela signifie que le système de contrôle peut s’adapter à un nombre virtuellement illimité de molécules, tandis que les patients peuvent exécuter eux-mêmes le contrôle à la maison, et recevoir une information d’une qualité de niveau laboratoire. Les méthodes de laboratoire courantes pour faire cela sont complexes et coûteuses, et réduisent la qualité de vie des patients, puisqu’ils doivent souvent être confiné dans un hôpital ou à proximité.
Remplacer la protéine de liaison par un anticorps établit un pipeline général pour la génération de biocapteurs qui peuvent identifier un médicament de synthèse dans un échantillon sanguin du patient. En guise de démonstration de principe, les scientifiques de l’EPFL ont testé avec succès les nouveaux biocapteurs contre trois médicaments - le méthotréxate, la théophylline et la quinine - au laboratoire. La prochaine étape sera d’optimiser la sensibilité du biocapteur, afin qu’il puisse détecter avec précision des concentrations nanomolaires, et même inférieures, de médicaments ou biomolécules dans des échantillons cliniques.
Il a aussi reçu des contributions de la Protein Expression Core Facility de l’EPFL.
Dossier presse (documents, images, vidéos): http://go.epfl.ch/a4v
Référence
Lin Xue, Qiuliyang Yu, Rudolf Griss, Alberto Schena, Kai Johnsson. Bioluminescent antibodies for point-of-care diagnostics. Angewandte Chemie 16 May 2017. DOI: 10.1002/anie.201702403