Mieux comprendre la maladie du « foie gras »

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Mieux comprendre la maladie du « foie gras »

Des scientifiques de l’EPFL ont découvert un nouveau mécanisme biologique derrière la stéatose hépatique non alcoolique.

La stéatose hépatique non alcoolique couvre une gamme de maladies résultant de l’accumulation de graisses dans le foie, mais qui n’est pas la conséquence d’un abus d’alcool. L’accumulation de graisses peut conduire à une inflammation du foie, à des cicatrices et à des dommages irréversibles, telles que la cirrhose et l’insuffisance hépatique. La maladie peut être causée par la suractivité anormale d’une protéine impliquée dans la biosynthèse d’acides gras dans le foie, provoquant leur accumulation. Des scientifiques de l’EPFL viennent de découvrir le mécanisme pathologique qui provoque cette dérégulation, ce qui constitue un grand pas vers le traitement de la maladie. Ce travail est publié dans The Journal of Clinical Investigation.

On estime actuellement que la stéatose hépatique non alcoolique affecte plus de 100 millions de personnes aux Etats-Unis seulement, et 20% à 30% de la population générale dans le monde occidental. Elle est plus élevée chez les patients atteints de diabète sucré de type 2 (70%) et ceux atteints d’obésité morbide (90%).

La protéine qui régule la biosynthèse des acides gras dans le foie s’appelle SREBP-1 (sterol element binding protein 1). Dans la stéatose hépatique non alcoolique, son activité est souvent augmentée, ce qui conduit à des niveaux accrus de graisses dans le foie.

Le laboratoire de Kristina Schoonjans à l’EPFL s’est intéressé à ce qui régule l’activité de SREBP-1, et plus spécifiquement à un récepteur appelée homologue du récepteur du foie 1, qui se situe dans le noyau des cellules du foie. Celui-ci joue un rôle dans un grand nombre de fonctions biologiques, qui vont de la régulation du cycle des cellules à la coordination du glucose et à l’homéostasie stéroïdienne.

Les chercheurs ont étudié une forme mutante de l’homologue du récepteur du foie 1, qui ne peut pas subir une modification importante appelée SUMOylation. Cette modification, qui « marque » la protéine, se produit dans de nombreuse protéines à l’intérieur de la cellule et leur permet de mettre en ’uvre différents processus essentiels à la cellule.

Les scientifiques ont démontré comment le récepteur non SUMOylable provoque chez la souris l’activation de SREBP-1 dans le foie, et peut conduire à la stéatose hépatique non alcoolique. Lorsque les chercheurs ont nourri les souris avec un régime riche en graisses et en saccharose, leur foie s’est rapidement chargé en graisses, et a présenté des inflammations et des fibroses. Les souris de contrôle possédant la version normale du récepteur ont été moins affectées par ce régime.

Des investigations plus poussées ont montré que cela se produit par l’intermédiaire d’un troisième acteur, la protéine de liaison 3 à l’oxystérol, dont les niveaux sont très bas dans le foie sain, mais plus élevés en cas de maladie. «De nouvelles études devraient révéler les mécanismes précis sous-tendant le processus qui génère ces dérangements métaboliques, et valider la protéine de liaison 3 à l’oxystérol comme biomarqueur potentiel pour la stéatose hépatique non alcoolique», dit Kristina Schoonjans.

Ce travail a été dirigé par Vera Lemos et Sokrates Stein, actuellement à l’Université de Zurich, et résulte de collaborations entre l’Institut de Bioingénierie de l’EPFL, l’Université de Porto, l’Universitat Autònoma de Barcelona, et l’Université de Groningue. Il a été financé par l’EPFL, le Fonds national suisse, La Leopoldina de l’Académie des Sciences allemande, la Novartis Consumer Health Foundation, la Fondation portugaise pour la Science et la Technologie, l’Université de Groningue, et la Generalitat de Catalogne.

Référence

Sokrates Stein, Vera Lemos, Pan Xu, Hadrien Demagny, Xu Wang, Dongryeol Ryu, Veronica Jimenez, Fatima Bosch, Thomas F. Lüscher, Maaike H. Oosterveer, Kristina Schoonjans. Impaired SUMOylation of nuclear receptor LRH-1 promotes nonalcoholic fatty liver disease. The Journal of Clinical Investigation 17 January 2017. DOI: 10.1172/JCI85499