L’optomécanique simule les réseaux de graphène

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A superconducting circuit optomechanical graphene lattice. Credit: Andrea Bancor
A superconducting circuit optomechanical graphene lattice. Credit: Andrea Bancora (EPFL)

Des scientifiques de l’EPFL ont résolu les problèmes de mise à l’échelle des systèmes optomécaniques quantiques et ont créé le premier réseau de graphène optomécanique à circuit supraconducteur.

Le contrôle précis des oscillateurs micromécaniques est essentiel à de nombreuses technologies contemporaines, de la détection et la synchronisation aux filtres de radiofréquences des smartphones. Au cours de la dernière décennie, le contrôle quantique des systèmes mécaniques a été solidement établi avec les atomes, les molécules et les ions dans la première vague de développement et les circuits supraconducteurs dans la seconde révolution quantique.

Cette évolution a notamment été portée par l’optomécanique en cavité. Ce domaine nous a permis de contrôler des objets mécaniques mésoscopiques avec une force de pression due au rayonnement électromagnétique. Cela a considérablement amélioré notre compréhension de leur nature quantique, ce qui a permis de nombreuses avancées, notamment le refroidissement vers l’état fondamental, les états quantiques comprimés et l’intrication à distance d’oscillateurs mécaniques.

Des études théoriques pionnières ont prédit qu’il était possible d’accéder à une physique nettement plus riche et à de nouvelles dynamiques dans les réseaux optomécaniques, y compris la dynamique collective quantique et les phénomènes topologiques. Mais la reproduction expérimentale de tels dispositifs sous contrôle strict, ainsi que la construction de réseaux optomécaniques pouvant accueillir de multiples degrés de liberté optiques et mécaniques couplés, représentent un défi.

Les chercheuses et chercheurs de l’équipe de Tobias J. Kippenberg de la Faculté des sciences de base de l’EPFL ont créé le premier réseau optomécanique à circuit supraconducteur configurable et à grande échelle, capable de remédier aux problèmes de mise à l’échelle des systèmes optomécaniques quantiques. L’équipe a réalisé un réseau de graphène tendu optomécanique et a étudié les états de bords topologiques non triviaux à l’aide de nouvelles techniques de mesure. Ses travaux sont publiés dans la revue Nature.

L’élément principal, qui fait partie de chaque site du réseau, est un «condensateur à vide avec membrane», constitué d’un mince film d’aluminium suspendu au-dessus d’une tranchée sur un substrat de silicium. Celui-ci constitue la partie vibrante du dispositif et, en même temps, forme un circuit résonnant à micro-ondes avec un inducteur en spirale.

«Nous avons mis au point une nouvelle technique de nanofabrication pour les systèmes optomécaniques à circuit supraconducteur avec une grande reproductibilité et des tolérances extrêmement strictes sur les paramètres des dispositifs individuels», explique Amir Youssefi, qui a dirigé le projet. «Ainsi, les différents sites sont pratiquement identiques, comme dans un réseau naturel.»

Le réseau de graphène est réputé pour présenter des propriétés topologiques non triviales et des états de bords localisés. Les chercheuses et chercheurs ont observé ces états dans ce qu’ils appellent un «flocon de graphène optomécanique», composé de vingt-quatre sites.

«Grâce à l’architecture optomécanique intégrée, nous avons pu représenter directement et sans perturbation les formes des modes électromagnétiques collectifs dans ces réseaux», indique Andrea Bancora qui a participé à la recherche. «C’est une caractéristique unique de cette plateforme.»

Les mesures de l’équipe correspondent étroitement aux prédictions théoriques, ce qui montre que leur nouvelle plateforme constitue un moyen fiable pour étudier la physique topologique dans les réseaux unidimensionnels et bidimensionnels.

«En ayant accès aux niveaux d’énergie et aux formes des modes de ces excitations collectives, nous avons pu reconstruire l’ensemble du hamiltonien sous-jacent du système, ce qui a permis pour la première fois d’extraire entièrement le désordre et les forces de couplage dans un réseau supraconducteur», déclare Shingo Kono, un autre membre de l’équipe de recherche.

La démonstration de réseaux optomécaniques permet non seulement d’étudier la physique des corps multiples avec la réalisation de modèles de réseau de matière condensée, mais aussi d’ouvrir la voie à de nouveaux systèmes quantiques hybrides lorsqu’ils sont combinés à des qubits supraconducteurs.

Tous les échantillons ont été fabriqués au Centre de MicroNanoTechnologie (CMi) de l’EPFL.

Références

Youssefi A. et al. Topological lattices realized in superconducting circuit optomechanics. Nature 21 December 2022. DOI: 10.1038/s41586’022 -05367-9