Des journées chaudes suivies de nuits torrides, sans qu’il y ait de refroidissement entre les deux, pourraient devenir la nouvelle norme vers la fin du 21e siècle. Des chercheurs de l’Université de Zurich ont analysé la fréquence, l’intensité et la durée de tels événements extrêmes pour cinq villes suisses. Les villes les plus touchées seraient Lugano et Genève.
Le changement climatique entraîne une augmentation de la fréquence et de l’intensité des phénomènes météorologiques extrêmes tels que les vagues de chaleur, les inondations et les sécheresses. Les étés caniculaires de ces dernières années ont déjà eu de graves conséquences sur la santé humaine, en particulier dans les villes, en raison de l’accumulation de chaleur pendant la journée et du manque de refroidissement pendant la nuit. De telles périodes de chaleur extrême survenant simultanément le jour (avec des températures de 28 à 35 degrés) et la nuit (avec des températures de 15 à 20 degrés) sont plus préoccupantes pour la santé que des journées ou des nuits chaudes isolées. De plus, elles dureront plus longtemps et seront plus fréquentes dans les villes suisses à l’avenir, comme le montre une étude de l’UZH.
Les vagues de chaleur pourraient être jusqu’à 8 fois plus fréquentes
Des chercheurs de l’Institut de géographie de l’UZH, de l’Université de Fribourg et de l’Institut fédéral de recherches WSL ont étudié l’impact de différents scénarios futurs sur la fréquence et l’intensité des vagues de chaleur diurnes et nocturnes simultanées dans les cinq villes suisses de Bâle, Berne, Genève, Lugano et Zurich. Ils estiment que les vagues de chaleur extrêmes, qui dépassent les températures diurnes et nocturnes du passé, pourraient être multipliées par 7,8 dans toutes les villes suisses d’ici la fin du siècle et que les événements correspondants pourraient être jusqu’à 5,3 fois plus longs. Nos résultats montrent la nécessité pour les villes suisses de s’adapter aux vagues de chaleur extrêmes en réduisant le réchauffement pendant la journée, en améliorant le refroidissement pendant la nuit et en renforçant la résistance de la population aux vagues de chaleur plus sévères’, explique Saeid Ashraf Vaghefi, premier auteur.
Trois scénarios analysés pour trois périodes
Dans leur étude, les chercheurs ont défini trois mesures pour analyser les vagues de chaleur : a) le nombre annuel de jours et de nuits chauds simultanés où le seuil est dépassé à la fois pour le jour et pour la nuit, b) la fréquence annuelle de ces événements où le seuil est dépassé pendant au moins deux jours consécutifs, et c) la durée réelle des événements correspondants. Ces mesures ont été combinées avec trois scénarios d’émissions - faible, modéré et élevé - et adaptées à trois périodes de trente ans chacune : le passé (1980-2020), le futur proche (2020-2050) et le futur lointain (2070-2100).
Lugano et Genève sont les plus touchées
Les résultats montrent que le nombre de jours et de nuits de canicule augmente de manière significative dans toutes les villes, mais qu’il est plus prononcé dans les villes situées à des latitudes inférieures : Lugano connaît la plus forte augmentation avec 65,8 jours dans le passé, 110 jours dans le futur proche et 371 jours dans le futur lointain, suivie par Genève avec 48 jours dans le passé, 108 jours dans le futur proche et 362 jours dans le futur lointain. Les augmentations sont toujours significatives, mais moins prononcées à Bâle (48 / 74 / 217 jours), Berne (15 / 44 / 213 jours) et Zurich (14 / 50 / 217 jours).
Des adaptations aux vagues de chaleur sont nécessaires
Dans notre étude, nous prévoyons que les épisodes combinés de chaleur diurne et nocturne seront plus probables et plus intenses dans toutes les villes et dans tous les scénarios d’émissions, mais qu’ils seront particulièrement significatifs dans les scénarios d’émissions élevées et après les années 2050’, résume Vaghefi. Une journée chaude suivie d’une nuit chaude, sans que l’homme puisse s’en remettre, pourrait devenir la nouvelle norme vers la fin du siècle. C’est pourquoi nous recommandons aux décideurs politiques et aux parties prenantes de procéder à une analyse systématique des options avant de mettre en OEuvre des adaptations à de tels événements extrêmes’.
Dans un projet en cours, les chercheurs étudient comment différentes mesures d’adaptation, telles que l’augmentation de la densité de la végétation, une meilleure utilisation des cours d’eau existants, la réduction de la chaleur anthropique par l’utilisation d’énergies vertes et renouvelables et la modification des périodes d’activité en plein air, influencent les seuils des différents moteurs des événements extrêmes.
Littérature :
Saeid Ashraf Vaghefi, Veruska Muccione, Raphael Neukom, Christian Huggel, Nadine Salzmann. Future trends in compound concurrent heat extremes in Swiss cities - An assessment considering deep uncertainty and climate adaptation options. Weather and Climate Extremes. 27 August 2022. DOI: 10.1016/j.wace.2022.100501