Coller le médicament sur la paroi intestinale enflammée

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Le lipide développé par les chercheurs est liquide à température ambiante et peu
Le lipide développé par les chercheurs est liquide à température ambiante et peut être injecté sous forme de lavement à l’endroit enflammé du gros intestin. Là, à la température du corps, il se forme en un gel visqueux et collant et reste en place pendant au moins six heures, libérant peu à peu le principe actif. Université de Berne, Marianna Carone

Le traitement de la colite ulcéreuse, une maladie inflammatoire chronique de l’intestin, donne souvent des résultats insatisfaisants. Des chercheurs de l’Université de Berne ont mis au point un gel lipidique qui s’applique directement sur la partie enflammée de l’intestin, y reste et libère son principe actif de manière uniforme. Il pourrait en résulter une nouvelle approche thérapeutique ciblée avec moins d’effets secondaires.

En cas de maladie touchant un organe ou un tissu spécifique, un médicament est généralement plus efficace et mieux toléré lorsqu’il est administré exactement là où il doit agir dans le corps. En revanche, lorsqu’il est avalé ou injecté, il se répand dans tout le corps. Cela augmente le risque d’effets indésirables.

Des chercheurs du Département de chimie, biochimie et pharmacie et de l’Institut de médecine tissulaire et de pathologie de l’Université de Berne ont développé, en collaboration avec des collègues de l’Hôpital universitaire de Zurich, un gel lipidique visqueux et auto-formant pour administrer des médicaments anti-inflammatoires directement sur la paroi du côlon ou du rectum.

Les traitements existants sont souvent insatisfaisants

Les patients atteints de colite ulcéreuse souffrent de douleurs abdominales spasmodiques, de diarrhée, de perte d’appétit et de poids ainsi que de fatigue. L’objectif du traitement est de faire disparaître les inflammations le plus complètement et le plus longtemps possible. Mais souvent, cela ne fonctionne pas comme prévu. Chez de nombreux patients souffrant de colite ulcéreuse, les effets secondaires d’un principe actif pris par voie orale peuvent l’emporter sur les avantages thérapeutiques", explique Paola Luciani du Département de chimie, biochimie et pharmacie de l’Université de Berne. En revanche, notre gel peut absorber une grande quantité de principe actif et le délivrer de manière ciblée".

La chaleur du corps fait épaissir le gel

Pour leur gel auto-formant, les chercheurs ont choisi un lipide bien toléré et déjà autorisé pour une utilisation chez l’homme. A température ambiante, il est liquide et peut être injecté sous forme de lavement à l’endroit enflammé du gros intestin. A la température du corps, il s’y forme un gel visqueux et collant qui reste en place pendant au moins six heures, libérant progressivement le principe actif.

Inflammation aiguë de l’intestin traitée chez la souris

Il existe un équilibre très complexe dans le milieu intestinal. De nombreux facteurs, tels que la paroi intestinale, le système immunitaire et les micro-organismes présents dans l’intestin, interagissent entre eux. En cas d’inflammation, cet équilibre est fondamentalement modifié. C’est pourquoi, après les premiers essais avec des membranes artificielles et des échantillons de tissus intestinaux de rats, il était nécessaire de tester le gel dans un organisme expérimental vivant. Pour ce faire, les chercheurs ont utilisé des souris présentant une inflammation intestinale comparable à celle de la colite ulcéreuse chez l’homme et les ont traitées pendant plusieurs jours avec le gel. Celui-ci était chargé d’une des deux substances anti-inflammatoires autorisées pour le traitement de la colite ulcéreuse difficile à traiter chez l’homme. Les deux substances actives sont prises par la bouche et ont des effets secondaires considérables lorsqu’elles sont utilisées de manière traditionnelle.

Une approche prometteuse

Cette nouvelle forme d’administration a donné des résultats très positifs", explique Philippe Krebs de l’Institut de médecine tissulaire et de pathologie de l’Université de Berne. L’état de santé des souris traitées s’est nettement amélioré. Par rapport aux groupes de contrôle, elles ont perdu moins de poids, ont eu de meilleurs taux d’inflammation et les signes d’inflammation dans la paroi intestinale ont davantage diminué. D’autres tests sur des modèles animaux sont nécessaires avant de pouvoir effectuer les premiers essais sur des patients avec le dépôt de médicaments qui se forme de lui-même. Simone Aleandri, du Département de chimie, biochimie et pharmacie de l’Université de Berne, déclare : ’Nous sommes confiants dans le fait que notre gel permettra de réduire les effets secondaires par rapport aux thérapies actuelles. L’objectif est d’obtenir un traitement de la colite convivial pour le patient, qui soulage plus efficacement les symptômes en raison de la libération ciblée et continue de la substance active.’

L’étude a été financée par l’Innovation Office de l’Université de Berne, le Fonds national suisse, la Fondation de recherche universitaire de Berne et un ’Seal of Excellence Fund’ (SELF) de l’Université de Berne.

Les résultats de cette recherche ont été publiés dans la revue scientifique Nature Communications.