La lutte contre le VIH a fait de grands progrès au cours des dernières décennies. Les médicaments antirétroviraux contiennent le virus et l’empêchent de se reproduire dans l’organisme et de se transmettre à d’autres personnes. Il existe toutefois des variantes du virus qui sont devenues résistantes aux médicaments. Dans les pays à haut revenu, les médecins testent donc le virus pour détecter les mutations de résistance lorsqu’un traitement antirétroviral ne fonctionne pas.
Dans les régions à faibles ressources, de tels tests de mutations virales ne sont toutefois pas facilement disponibles. Si le traitement n’a pas l’effet escompté, les médecins traitants ne peuvent que faire des suppositions et décider sur cette base des étapes ultérieures du traitement : Afin de contourner une éventuelle résistance du virus, le traitement devrait être changé pour d’autres médicaments. Toutefois, si la cause de l’échec du traitement est que les médicaments n’ont pas été pris quotidiennement comme prévu, il ne faut pas changer de médicaments.
Compte tenu des ressources financières limitées pour les programmes de lutte contre le VIH dans différents pays d’Afrique, les spécialistes discutent de la possibilité d’améliorer les résultats du traitement, en particulier chez les enfants et les adolescents, en augmentant le nombre de tests de résistance.
Des chercheurs autour de Niklaus Labhardt de l’Université de Bâle et de l’Hôpital universitaire de Bâle ont donc examiné avec différents partenaires internationaux si ces tests coûteux et nécessitant beaucoup de travail sont effectivement un levier efficace pour une meilleure gestion du VIH. Les résultats de leur étude, intitulée ’GIVE MOVE’, sont publiés dans la revue spécialisée ’The Lancet Global Health’.
Les tests de résistance seuls n’apportent pas grand-chose
L’étude s’est déroulée dans dix centres cliniques au Lesotho et en Tanzanie et a recueilli les données de 284 participants âgés de 6 mois à 19 ans. Les enfants et les adolescents recevaient tous un traitement antirétroviral, mais présentaient malgré tout une concentration élevée du virus IH dans les échantillons de sang.Les chercheurs les ont répartis de manière aléatoire en deux groupes : Dans le premier, le personnel spécialisé a effectué des tests de détection de mutations de résistance sur le virus. Le second groupe a reçu les soins habituels avec des tests répétés de charge virale et un traitement empirique.
Résultat : les tests génétiques de résistance n’ont pas amélioré le traitement de manière significative. 36 semaines après le point de départ de l’étude, il n’y avait pas de différence significative entre les deux groupes en termes de charge virale. ’Cela contredit l’hypothèse selon laquelle un traitement basé sur des tests de résistance à grande échelle conduirait à de meilleurs résultats cliniques et virologiques’, résume le Dr Jennifer Brown, premier auteur de l’étude.
L’adhésion au traitement est décisive
La raison principale de la charge virale toujours élevée malgré les médicaments antirétroviraux semble plutôt résider dans le fait que la substance active n’est pas prise quotidiennement comme prévu, selon le responsable de l’étude Niklaus Labhardt. Une amélioration de l’observance du traitement serait plus efficace qu’une introduction à grande échelle des tests de résistance. C’est pourquoi ce résultat est si important, car il nous aide à établir des priorités quant à l’affectation des ressources limitées aux programmes de lutte contre le VIH.’Les chercheurs espèrent ainsi qu’à l’avenir, davantage de ressources seront allouées à des programmes qui prennent en compte les besoins spécifiques des enfants et des adolescents et améliorent ainsi l’adhésion au traitement. Parallèlement, il est important de déterminer quels enfants et adolescents présentent le plus grand risque de résistance aux virus, afin que les tests de résistance relativement coûteux puissent être utilisés de manière ciblée là où ils sont le plus susceptibles d’être utiles.
Outre des chercheurs de l’Université de Bâle et de l’Hôpital universitaire de Bâle, des experts de l’Institut tropical et de santé publique suisse, de l’organisation à but non lucratif SolidarMed, de la ’Baylor College of Medicine Children’s Foundation’ et du ’Seboche Mission Hospital’ au Lesotho, ainsi que de l’’Ifakara Health Institute’ et de l’organisation ’Management and Development for Health’ en Tanzanie ont également participé à l’étude. L’étude a été financée par la Fondation Botnar, le Fonds national suisse et la Fondation Gottfried et Julia Bangerter-Rhyner.
Publication originale
Jennifer Anne Brown et al.
Prise en charge informée par la résistance contre prise en charge empirique de la viramie chez les enfants et les adolescents atteints du VIH au Lesotho et en Tanzanie (essai GIVE MOVE) : un essai contrôlé randomisé multisites et en ouvert.
The Lancet Global Health (2024), doi : 10.1016/S2214-109X(24)00183-9