Le comportement reproductif dans le monde animal est extrêmement diversifié. Une étude menée par le Département d’écologie et évolution de l’Université de Lausanne, en collaboration avec le Naturéum, démontre la première évidence de reproduction sans intromission chez un mammifère. Les résultats sont publiés dans l’édition du 20 novembre 2023 de la revue "Current Biology".
Il est difficile d’observer le comportement des animaux nocturnes, et plus encore des animaux volants. La biologie des chauves-souris recèle encore de nombreux secrets. On sait notamment peu de choses sur leurs modes de reproduction, qui varient certainement beaucoup entre les 1400 espèces de chauves-souris connues à ce jour. Jusqu’à présent, on pensait que le mode copulatoire des mammifères impliquait toujours la pénétration du pénis dans le vagin. Une étude révèle une exception de taille chez les chauves-souris, un groupe de mammifères dont les moeurs sexuelles sont encore très mal documentées.
Cette étude, publiée dans la revue Current Biology, a été menée par Nicolas J. Fasel , collaborateur scientifique au sein du groupe du Pr Philippe Christe au Département d’écologie et évolution de la Faculté de biologie et de médecine de l’Université de Lausanne, en collaboration avec le Naturéum ( Muséum cantonal vaudois des sciences naturelles ) et des chercheurs d’Ukraine, des Pays-Bas, de Pologne et d’Allemagne. Elle s’est focalisée sur la description des accouplements et de la morphologie de l’appareil reproducteur de la sérotine commune (Eptesicus serotinus), une chauve-souris insectivore dont l’aire de distribution s’étend en Europe, au Moyen-Orient et en Asie centrale. Chez cette espèce, la taille du pénis en érection est disproportionnée - près d’un quart de la taille du corps - par rapport à celle du vagin.
Pour comprendre comment ces chauves-souris s’accouplent, les biologistes ont observé leur comportement dans les combles d’une église au Pays-Bas, en captivité temporaire dans un centre de réhabilitation en Ukraine ainsi que dans les mines de Baulmes en Suisse.
L’observation en direct du comportement reproducteur d’une centaine de couples montre que les mâles n’utilisent pas leur pénis comme organe d’intromission pour s’accoupler. Après avoir saisi la femelle en position dorso-ventrale, le mâle applique fermement son pénis contre la vulve de sa partenaire. Le couple peut rester dans cette position pendant plusieurs heures. Ces observations et la morphologie particulière du pénis de la sérotine commune constituent la première évidence de reproduction sans intromission chez un mammifère.