
Il est prouvé depuis longtemps que la lumière du jour a une influence positive sur la santé physique et mentale. Pourtant, cette connaissance est encore peu appliquée dans la vie quotidienne et en clinique. C’est ce que la "Integrative Human Circadian Daylight Platform" veut changer dans les années à venir. Ce projet interdisciplinaire sous direction bâloise est soutenu par la fondation Velux à hauteur de plus de deux millions de francs.
De nombreuses personnes âgées, même en bonne santé, souffrent d’un sommeil de mauvaise qualité", explique Mirjam Münch. La spécialiste du sommeil et chronobiologiste suppose que le manque de lumière du jour est en partie responsable de ce problème. Dans le cadre d’une étude qui vient de débuter, elle souhaite examiner si la lumière du jour, combinée à d’autres mesures à bas seuil, peut améliorer durablement la qualité du sommeil.
Cette étude n’est qu’un exemple parmi les nombreuses activités de la ’Integrative Human Circadian Daylight Platform’ iHCDP. Le projet a été lancé en septembre dernier et est placé sous la direction de Christian Cajochen, directeur du Centre de chronobiologie des Cliniques psychiatriques universitaires de Bâle. Le financement de plus de deux millions de francs pour les quatre prochaines années est pris en charge par la Fondation Velux Suisse.
L’objectif de la plateforme est de promouvoir la recherche sur la lumière du jour, à la fois par le biais de projets de recherche propres et par la mise en réseau interdisciplinaire de scientifiques à l’aide d’un data hub et d’une collaboration avec des partenaires nationaux et internationaux.
De plus, la recherche sur la lumière du jour doit être reliée aux domaines de la recherche sur le vieillissement et de l’ophtalmologie, et le public doit également avoir un meilleur accès aux connaissances de cette recherche et en profiter. La nouveauté de notre plate-forme est qu’elle met en relation des experts de niveaux très différents", explique le Dr Miriam Ries, coordinatrice du programme. La plate-forme est divisée en trois modules, consacrés respectivement à la recherche fondamentale, à la recherche appliquée et au développement de nouvelles thérapies.
Le bon éclairage à l’intérieur aussi
Le Dr Mirjam Münch dirige le module qui vise à promouvoir l’application des résultats scientifiques de la recherche sur la lumière du jour dans l’environnement quotidien : Par exemple, son étude sur la qualité du sommeil des personnes âgées pourrait aider les architectes à mieux prendre en compte l’influence de la lumière du jour lors de la construction de maisons de retraite. Il est également envisageable d’en déduire des directives pour une conception optimale de l’éclairage dans les bâtiments publics. Nous pensons qu’une mise en OEuvre à long terme de telles approches peut améliorer la santé des personnes âgées en général, mais pas seulement", explique-t-elle.
Toutefois, les mécanismes biologiques qui se cachent exactement derrière les effets positifs de la lumière du jour ne sont pas encore totalement élucidés. C’est pourquoi un deuxième module de la plate-forme est consacré à l’étude des bases physiologiques. Selon les connaissances actuelles, des parties de la lumière du jour invisibles pour nous déclenchent des signaux sur la rétine des yeux, qui sont ensuite transmis au cerveau. Celui-ci donne alors le rythme à l’horloge interne. Le responsable de ce module est le professeur Manuel Spitschan de l’Institut Max-Planck de cybernétique biologique à Tübingen et de l’Université technique de Munich.
Soigner par la lumière
Enfin, le troisième module vise à faire progresser le développement de thérapies basées sur la lumière. L’information lumineuse de l’environnement est également transmise à l’horloge biologique supérieure de l’hypothalamus par des cellules spécialisées de la rétine de l’OEil", explique Münch.
De nos jours, nous ne sommes souvent exposés qu’à un éclairage électrique qui rend difficile la distinction entre le jour et la nuit pour les horloges biologiques, notamment parce qu’il n’y a pas assez de lumière pendant la journée et trop de lumière le soir.’ Combiné à d’autres facteurs qui affectent la synchronisation du rythme circadien jour/nuit, cela peut augmenter à long terme le risque de nombreuses maladies - du diabète, des maladies cardiovasculaires aux troubles du sommeil et à la dépression.
Afin de tester des traitements innovants avec une approche chronothérapeutique, le Dr Corrado Garbazza va prochainement mettre en place une ’Circadian Health Clinic’ au Centre de chronobiologie. Le potentiel de cette approche est illustré par une étude récemment publiée par son groupe de travail : une demi-heure de luminothérapie pendant six semaines a réduit de manière significative le risque de dépression pendant la grossesse.
La plate-forme souhaite informer le grand public des dernières découvertes en matière de recherche sur la lumière du jour à l’occasion de différentes manifestations et par le biais de formats numériques. Le public devrait ainsi prendre davantage conscience de l’importance de l’exposition à la lumière pour le bien-être. Nous voulons si possible transmettre nos résultats au grand public", explique Münch. La science ne doit pas rester enfermée dans sa tour d’ivoire.