«Je cherchais le lien entre les neurosciences et l’ingénierie»

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© 2024 EPFL/Alain Herzog - CC-BY-SA 4.0
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Mélina Lasfargues a eu l’honneur d’être la première étudiante à terminer le Master Neuro X, avec son projet sur les illusions thermiques.

Alors que nous nous installons dans une cabine ronde, grise et insonorisée du Campus Biotech à Genève, Mélina Lasfargues fait immédiatement preuve de la détermination qui la caractérise. «Vers l’âge de 7 ou 8 ans, je savais déjà que je voulais être médecin», déclare-t-elle lorsqu’on lui demande de se présenter. Cette détermination l’a conduite à être la première étudiante à terminer l’exigeant programme de Master Neuro X, un Master obtenu au carrefour de trois facultés de l’EPFL: Sciences et techniques de l’ingénieur, Sciences de la vie et Informatique et communication.

Mélina est née et a grandi dans le sud de la France. Dès son plus jeune âge, elle veut explorer les mystères du cerveau humain. Une fascination précoce pour les neurosciences déclenchée par les contacts avec son arrière-grand-mère malade. «Bien qu’on ne lui ait jamais diagnostiqué de maladie neurodégénérative, la vieillesse avait fait des ravages sur le plan cognitif. Je l’ai aidée dans ses tâches quotidiennes et j’ai fait semblant d’être un médecin pour elle», raconte Mélina.

Le Master Neuro X correspondait parfaitement à mes attentes.

Mélina Lasfargues, première étudiante à terminer l’exigeant programme de Master Neuro X


A l’université, Mélina suit sa voie et obtient un Bachelor en ingénierie des sciences du vivant à l’EPFL, où elle est attirée par l’approche interdisciplinaire combinant la biologie et l’ingénierie. Pour son Master, son intérêt pour le cerveau la guide vers le programme Neuro X. «Je cherchais à faire le lien entre les neurosciences et l’ingénierie, et ce programme correspondait parfaitement à mes attentes», explique-t-elle. «J’ai eu la chance que le Master Neuro X soit arrivé juste au moment où je terminais mon Bachelor en 2022.»

Son projet de Master porte sur les illusions thermiques. Il a été réalisé au Laboratoire d’ingénierie neurale translationnelle (TNE) de Silvestro Micera, sous la supervision de Solaiman Shokur. Elle a créé ces illusions à l’aide de dispositifs appelés thermodes, qui appliquent des températures spécifiques à la peau pour générer des sensations de chaleur et de froid.

«Je suis fière d’avoir mené des expériences d’illusion thermique qui n’avaient jamais été étudiées auparavant», déclare-t-elle. «J’ai non seulement analysé les données qui ont abouti à des résultats intéressants, mais j’ai également dû beaucoup coder.»

Déplacement de température

En plaçant des thermodes sur les avant-bras des volontaires et en manipulant les températures, ses expériences ont produit l’illusion d’une sensation de température à mi-chemin entre les deux thermodes, et même la sensation d’un mouvement le long du bras, comme si la température se déplaçait d’une thermode à l’autre.

C’est la raison pour laquelle j’ai adoré travailler dans ce laboratoire. Toutes les recherches qui y sont menées ont pour objectif d’être appliquées un jour.

Mélina Lasfargues, première étudiante à terminer l’exigeant programme de Master Neuro X


«En fonction de l’intensité des thermodes, nous avons constaté que nous pouvions modifier la position de la sensation illusoire, et même la faire «bouger» le long de l’avant-bras», explique Mélina. Les illusions thermiques, un domaine de recherche en plein essor, sont actuellement étudiées chez des personnes ne souffrant d’aucun handicap. Mais pour les personnes amputées, qui intéressent le TNE, une meilleure compréhension des mécanismes neuronaux sous-jacents pourrait conduire à une amélioration significative du développement des prothèses.

«C’est la raison pour laquelle j’ai adoré travailler dans ce laboratoire. Toutes les recherches qui y sont menées ont pour objectif d’être appliquées un jour à des bénéficiaires de soin dans un environnement réel», dit-elle.

Sortir de sa bulle

Outre les neurotechnologies, la future neuro-ingénieure trouve son équilibre dans la natation. Tout au long de son parcours universitaire, elle a travaillé comme monitrice de natation, donnant des cours à de jeunes enfants et aidant les parents à initier leurs bébés à l’eau. «J’adore l’eau et je nage depuis toujours», dit-elle. Elle y trouve aussi une pause rafraîchissante dans un programme académique intense. «L’EPFL, c’est génial, mais c’est bien de sortir de sa bulle et d’interagir avec des gens différents chaque week-end», note-t-elle.

La prochaine étape? «J’adorerais travailler en laboratoire et j’aimerais faire un doctorat, mais cela dépendra des opportunités qui se présenteront.» Qu’elle poursuive ses études ou qu’elle s’aventure dans l’industrie, son objectif reste clair: contribuer de manière significative aux neurosciences et aider à combler le fossé entre la recherche et les applications dans le monde réel.