Un tiers des Suisses n’a pas suivi de formation continue au cours des cinq dernières années. C’est ce que révèle une enquête de l’Office fédéral de la statistique. Les raisons invoquées par les personnes interrogées sont le manque de temps, les contraintes familiales ou les coûts. Pour moi, ces chiffres montrent que le modèle actuel de formation continue doit évoluer.
Le modèle actuel se caractérise par des programmes de formation continue plutôt longs et fermés sur eux-mêmes (Master, Diploma ou Certificate of Advanced Studies). Au cours des dernières années, l’offre de la School for Continuing Education de l’ETH Zurich a, sans surprise, connu la plus forte croissance dans le format le plus court, le Certificate of Advanced Studies (CAS). La même tendance peut être observée dans toute la Suisse. Les programmes CAS sont faciles à concilier avec une activité professionnelle ou des obligations familiales. Et il est parfois possible de les cumuler petit à petit - ou CAS par CAS - pour obtenir un diplôme supérieur. Le débat actuel au sein de l’Union européenne sur les "microcrédits" montre que des formats encore plus courts sur des sujets très spécifiques sont demandés.
Lukas Sigrist a étudié la chimie à l’ETH Zurich et dirige depuis 2019 le bureau de l’ETH School for Continuing Education. Il est également vice-président de Swissuni, la Fédération suisse pour la formation continue universitaire.
A l’avenir - c’est ma thèse -, de tels cadres et formats joueront de toute façon un rôle secondaire. La formation (continue) ne se déroulera plus dans des cadres délimités dans le temps, elle sera bien plus un continuum de prestations d’apprentissage dans lequel les connaissances et compétences manquantes seront complétées de manière ciblée en fonction des besoins. Une telle formation continue serait plus proche de la notion d’"apprentissage tout au long de la vie" que le modèle actuel.
Si l’on va jusqu’au bout de ce concept, les études de base devront également être modifiées.
" Cela n’a alors plus de sens de transmettre la majeure partie des connaissances spécialisées d’un domaine dans le cadre d’un bachelor et d’un master en début de carrière. "
Nous savons depuis des années qu’un diplôme universitaire ne suffit plus pour toute la vie professionnelle. La formation continue est née de l’exigence selon laquelle les connaissances et les compétences existantes doivent être complétées et élargies de temps en temps. Si le "de temps en temps" devient à l’avenir "en continu", le modèle actuel du "frontloading" perdra également sa justification. Cela n’a alors plus de sens de transmettre la majeure partie des connaissances spécialisées d’un domaine dans le cadre d’un bachelor et d’un master en début de carrière.
Le bachelor comme ticket d’entrée sur le marché du travail
Nous devons plutôt revenir à l’idée initiale de Bologne : Le diplôme de bachelor doit devenir le ticket d’entrée sur le marché du travail, les études de master sont déjà une spécialisation et n’ont vraiment de sens que pour un groupe sélectionné de personnes en tant que poursuite d’études. Dans un tel avenir, les études de master ne feraient plus partie intégrante de la formation de base. Dans les hautes écoles spécialisées, cette vision est déjà une réalité, dans les hautes écoles universitaires, de telles tendances sont également perceptibles.D’aucuns pourraient objecter qu’un cursus de base perd sa base technique et donc sa qualité si on le raccourcit. Ce raisonnement n’est toutefois valable que si les études de base sont considérées comme une unité isolée et achevée - et la formation continue comme une option à laquelle on a recours lorsqu’une personne a des lacunes dans ses connaissances. Mais si nous partons du principe qu’il n’y aura plus de formation sans faille et que la formation continue deviendra une norme continue, le tableau change. Seules les frontières s’estompent : le fait qu’un programme relève de la formation ou plutôt de la formation continue ne jouera plus un rôle aussi important. Et une formation continue qui se prolonge dans la vie professionnelle a aussi ses avantages. Car aujourd’hui déjà, la qualité d’une formation ne se mesure pas seulement à la quantité de connaissances, mais aussi à la manière dont elles peuvent être appliquées.
Forum de la formation continue 2024 le 23 avril
Quel est l’avenir de la formation continue ? C’est la question dont discuteront des experts lors du Forum de la formation continue 2024 de la School for Continuing Education, parmi lesquels la manager et présidente des anciens élèves de l’ETH Jeannine Pilloud, le professeur Ulf-Daniel Ehlers de la haute école duale de Bade-Wurtemberg et la présidente de Swissuni Christina Cuonz.Joël Mesot, président de l’ETH, souhaite la bienvenue. Le recteur Günther Dissertori prononcera le mot de la fin.
Le forum de formation continue de l’ETH Zurich s’adresse en premier lieu aux professeurs de l’ETH Zurich, en particulier à ceux qui sont engagés dans la formation continue de l’ETH Zurich ou qui sont intéressés à proposer un programme de formation continue ou un cours. Les personnes intéressées en dehors de l’ETH sont toutefois les bienvenues.
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