Informatique : Scala va-t-il damer le pion à Java?

Une révolution tranquille prend place dans nos ordinateurs. Scala, le langage de programmation utilisé par Twitter et Foursquare, pourrait gagner la partie. La version 2.8 est l’occasion d’un événement de taille à l’EPFL.

A terme, un nouveau langage de programmation pourrait remettre en cause la position de Java dans le monde du web et des applications commerciales. Développé à l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (EFPL) en Suisse, Scala est d’ores et déjà la technologie choisie par de nombreuses plateformes internet telles que Twitter, LinkedIn ou FourSquare. Reconnu pour sa puissance, son élégance et son confort de programmation, le langage aurait d’ores et déjà séduit plus de 100’000 professionnels. L’industrie en suit de près les développements. Le 15 avril marquera une étape importante avec la sortie de la version 2.8, et l’organisation des Scala Days sur le campus de l’EPFL.

“J’ai créé Scala dans le but d’accélérer le développement, le potentiel d’évolution et la fiabilité des applications”, explique son créateur, le professeur de l’EPFL Martin Odersky (biographie ci-dessous). Il est également l’auteur du compilateur actuellement utilisé par les programmeurs Java, pour lequel il a développé le concept de programmation générique, réutilisé pour son nouveau langage. Le nom de Scala dérive de l’anglais scalable (évolutif) : Martin Odersky définit volontiers son langage comme «future-proof», c’est-à-dire capable de faire face aux sollicitations croissantes des utilisateurs et du matériel.

La version 2.8 introduit de nombreuses nouveautés. La plus importante, à savoir la réécriture complète de la librairie Scala collection library, promet un gain important en termes de puissance, de fiabilité et de confort d’utilisation. Le lifting de l’environnement de développement et la nouvelle nouvelle extension Named and default devraient également faciliter le travail des programmeurs. «La version 2.8 consolide la philosophie de Scala, tournée vers la productivité et l’aisance d’utilisation», résume Martin Odersky.

Scala n’a pas tardé à être adopté dans les universités les plus prestigieuses. «Ce langage est un élément essentiel de notre stratégie», témoigne Kunle Olukotun, professeur à Stanford. Constitués aujourd’hui de deux ou quatre coeurs, les ordinateurs personnels en compteront bientôt plusieurs dizaines, prédit-il. Avec Scala, ce pionnier des microchips «multi-coeurs» développe de nouvelles architectures, où la puissance de centaines d’ordinateurs est concentrée dans une unique puce.

Scala est un élégant mariage de programmations fonctionnelle et orientée objet. Des outils permettent aux programmeurs Java une transition en douceur vers Scala. Plus intuitif que son prédécesseur, il permet une meilleure productivité, et son code facile à déchiffrer réduit d’autant les frais de maintenance à long terme.

Twitter, EDF, Foursquare, Siemens, Xerox, LinkedIn ou Sony sont d’ores et déjà convaincus. Alex Payne, responsable de l’interface de programmation de Twitter, s’exprime ainsi à propos de Scala : «nous voulions produire le code le plus précis mais aussi le plus simple à maintenir possible. Nous voulions limiter les coûts – ce que veulent d’ailleurs toutes les entreprises. Enfin nous voulions aussi utiliser un langage qui nous passionne réellement.» La passion est contagieuse. Les 15 et 16 avril prochain, plus de 100 professionnels assisteront aux Scala Days à l’EPFL.

Martin Odersky est professeur à l’Ecole Polytechnique Fédérale de Lausanne (EPFL) en Suisse. Avant de créer Scala, il a été l’un des contributeurs majeurs au développement du langage Java. On lui doit les languages Pizza et GJ, la conception des génériques Java ainsi que son compilateur de reference, javac. Il s’intéresse tout particulièrement à la programmation de languages et au développement de nouvelles methodes permettant de faire cohabiter programmation fonctionnelle et orientée objet.

Martin Odersky est titulaire d’un doctorat de l’Ecole Polytechnique Fédérale de Zürich en 1989. Sa carrière de chercheur s’est poursuivie à l’IBM T.J. Watson Research Center, à l’Université de Yale, de Karlsruhe et de South Australia. Il est devenu professeur à l’EPFL en 1999.