Amélioration de la compréhension du cerveau

Amélioration de la  compréhension du cerveau

L’étude de patients atteints de lésions cérébrales permet de mieux comprendre l’organisation du cerveau et d’améliorer la prise en charge clinique. Un groupe de recherche en neurologie a établi des relations statistiques entre la localisation des lésions du cerveau suite à un accident vasculaire ou une tumeur cérébrale et les déficits fonctionnels qui en résultent.

Induites par des accidents vasculaires ou des tumeurs, les lésions du cerveau représentent la première cause de handicap acquis chez l’adulte dans les pays industrialisés. Les conséquences des lésions cérébrales concernent tant les fonctions cognitives, comme la perception, la mémoire ou le langage, que les fonctions motrices. L’étude, dirigée par le Lucas Spierer, co-directeur du Laboratoire des sciences cognitives et neurologiques du Département de médecine de l’Université de Fribourg et collaborateur du Service de neuropsychologie et neuroréhabilitation du CHUV, révèle en particulier l’impact des lésions cérébrales sur la production de gestes. Les résultats ont non seulement démontré que l’hémisphère gauche du cerveau est responsable de la production motrice à valeur communicative, mais aussi que des lésions de différentes régions de cet hémisphère induisent différents types d’erreurs. Elle permet également de prédire plus spécifiquement quels types de symptômes peuvent être attendus chez les patients cérébrolésés d’après la localisation de leurs lésions et donc améliorer leur prise en charge clinique. «Grâce au nombre très important de patients inclus dans l’étude – plus de 150 –, nous avons aussi pu comparer les conséquences fonctionnelles de lésions induites par des tumeurs ou par des accidents vasculaires, une question cruciale mais très peu explorée jusqu’ici», souligne Lucas Spierer.

«Si je m’aperçois qu’une pièce de ma voiture est endommagée et que, en parallèle, je constate que la voiture ne peut plus s’arrêter, je peux en déduire que la pièce en question fait partie du système de freinage. Dans cette étude, nous avons appliqué le même principe logique en examinant quelles lésions du cerveau sont associées à quels déficits», explique le chercheur. Aurélie Manuel, la doctorante qui a conduit l’étude, ajoute: «Nous nous sommes focalisés sur la pantomime, la capacité des patients à mimer l’utilisation d’objets du quotidien, comme par exemple le brossage des dents. La réussite de cette tâche dépend de nombreuses capacités, qui peuvent être atteintes sélectivement suite à une lésion : se souvenir comment tenir l’outil à mimer, sélectionner les bons gestes pour l’utiliser et finalement réaliser le mouvement. Ce test est utilisé dans le monde entier pour le diagnostic neuropsychologique de ce qu’on appelle l’apraxie, un trouble perturbant l’interface entre l’idée du mouvement et sa réalisation».

Techniques d’analyse de pointe

A partir de données radiologiques, les lésions de chaque patient ont d’abord été reconstruites en 3 dimensions par ordinateur, puis projetées dans une même modélisation du cerveau divisé en centaines de milliers de petits cubes ou «voxels». Pour chacun de ces voxels, les performances des patients à un test donné ont été comparées statistiquement entre les patients dont la lésion incluait ou non le voxel en question. Les chercheurs ont ainsi réussi à localiser très précisément les structures du cerveau qui, lorsqu’elles sont endommagées, perturbent une fonction donnée. Cette approche complémente avantageusement les techniques d’imagerie cérébrale fonctionnelle comme l’IRM, parce qu’au lieu d’établir de simples associations entre la réalisation d’une tâche et l’augmentation de l’activité dans certaines régions du cerveau, il est possible de démontrer si une structure cérébrale est nécessaire à la réalisation d’une tâche.