Lorsque le stress peut être bon pour vous

Lorsque le stress peut être bon pour vous

Une équipe a réalisé une étude qui démontre que le stress peut être bénéfique pour notre organisme.

Adaptations des cellules au stress
Constamment exposées à des modifications de leur environnement, les cellules de notre organisme sont sujettes à de multiples stress auxquels elles doivent pouvoir faire face de manière appropriée. A titre d’exemple, lorsque son génome est endommagé, une cellule arrête de proliférer pour tenter de réparer les dommages. Si ces derniers sont trop importants et représentent un danger potentiel pour l’organisme, la cellule peut décider de se suicider. Les mécanismes qui lui permettent de choisir entre les options de survie ou de suicide sont encore mal connus.

Le suicide de la cellule passe par son découpage minutieux
Appelé apoptose, le suicide des cellules suit un programme extrêmement bien contrôlé qui conduit au découpage de la cellule en plusieurs morceaux - les corps apoptotiques - lesquels seront ensuite éliminés par des macrophages. Certaines protéases - des protéines capables de couper d’autres protéines - jouent un rôle-clé dans ce processus apoptotique. De par leur fonction, ces enzymes ont été baptisées «caspases exécutrices». Lorsqu’elles sont activées par un stress important, les caspases exécutrices entrent en fonction et clivent leurs substrats. Ce sont ces derniers qui, une fois coupés, déclenchent le programme apoptotique.

Quand l’exécuteur devient protecteur
La caspase-3 a été identifiée en 1995 comme étant l’une des caspases exécutrices prépondérante permettant à la cellule de se suicider. C’est précisément sur cette protéase que porte la nouvelle étude de l’équipe du Département de physiologie, réalisée en étroite collaboration avec quatre autres groupes de recherche de la FBM. «Notre laboratoire a démontré dans des modèles murins que la caspase-3, lorsqu’elle est faiblement activée par divers stress, active une forte réponse de survie au lieu d’induire l’apoptose des cellules comme on aurait pu l’attendre», relève Christian Widmann. «Cette réponse anti-apoptotique dépend du clivage d’une protéine (p120 RasGAP) par la caspase-3 en un morceau appelé fragment N».

RasGAP, un senseur de stress
A l’inverse, lorsque le stress augmente, la caspase-3 est plus fortement activée et devient alors capable de couper le fragment N. Une fois clivé, ce dernier change de fonction et n’est plus en mesure de protéger les cellules. Le clivage différentiel de la protéine RasGAP par la caspase-3 permet donc à la cellule de déterminer si elle doit survivre à un stress jugé non dangereux (faible activation de la caspase-3 et formation du fragment N) ou si elle doit se suicider (forte activation de la caspase-3 et destruction du fragment N).

Un travail d’équipe au sein de la FBM
Ce travail a permis de démontrer que des souris transgéniques «knock-out», autrement dit déficientes pour la caspase-3, ou portant une mutation dans RasGAP empêchant son clivage par la caspase-3, s’avèrent plus sensibles à divers stress patho-physiologiques. Les situations suivantes ont été investiguées:

  • Le rayonnement UV-C induit plus de dommages de la peau chez ces souris
  • Leur coeur devient plus rapidement dysfonctionnel lorsque ces souris sont traitées avec l’agent anti-cancéreux doxorubicine connu pour ses effets secondaires cardiotoxiques
  • L’intestin de ces souris subit plus de dommages suite à une colite expérimentale
  • Le développement du système immunitaire de ces souris n’est en revanche pas touché.

«En résumé, ces travaux mettent en évidence la fine complexité d’un mécanisme de régulation face à des stimuli pathogéniques. L’organisme peut activer soit une voie de protection et une réponse de survie, soit à l’opposé le suicide cellulaire, en faisant appel dans les deux cas à la même protéine exécutrice de l’apoptose», conclut Christian Widmann.