Des physiciens de l’EPFL suggèrent un nouveau chemin afin de détecter des radiations infrarouges avec une sensibilité exceptionnelle, permettant la détection de signaux aussi faibles que celui d’un quantum unique de lumière.
En utilisant notre webcam ou la caméra de notre smartphone, nous expérimentons les formidables capacités des capteurs compacts et abordables développés durant les décennies précédentes dans le domaine visible du spectre électromagnétique. Au contraire, la détection de radiations de plus faibles fréquences et invisibles pour l’oeil humain (comme les radiations de l’infrarouge moyen ou lointain) nécessitent un équipement complexe et couteux. Le manque d’une technologie compacte empêche l’accès généralisé à des capteurs permettant la reconnaissance de molécules ou l’imagerie de radiations thermiques naturellement émises par nos corps. De nouveaux progrès conceptuels dans le domaine pourraient ainsi avoir un impact retentissant dans nos vies quotidiennes.
La technique la plus populaire de nos jours pour détecter les radiations dans l’infrarouge moyen et lointain réside dans des bolomètres constitués de réseaux de petits thermomètres mesurant la chaleur produite par l’absorption de ces radiations. Ces capteurs ont de nombreuses limitations, en particulier leur faible vitesse de réponse et leur incapacité à détecter de faibles niveaux de radiations.
La nouvelle approche suggérée par l’équipe de l’EPFL conduite par Christophe Galland et Tobias Kippenberg suit un chemin complétement différent : en premier, convertir la radiation invisible en lumière visible, puis, détecter cette lumière à l’aide des technologies existantes. Au coeur du nouveau concept se trouvent des nanostructures hybrides composées de métal et de molécules. Le métal est ajusté afin de condenser les radiations infrarouges sur les molécules qui sont de sorte mises en vibration. Ensuite, l’énergie de ces molécules en vibration est convertie à nouveau en radiation, mais cette fois à une fréquence bien plus grande, dans le domaine visible. Les structures hybrides, élaborées en collaboration avec Diego Martin-Cano (Max-Planck Institut für die Physik des Lichts, Erlangen, Allemagne) permettent une conversion très efficace tout en réduisant la taille du dispositif à des dimensions significativement inférieures à la longueur d’onde de la lumière infrarouge.
Philippe Roelli, auteur principal de l’étude, souligne que, parmi les différentes avancées conceptuelles envisagées grâce à leur méthode, son aspect le plus fascinant réside dans sa potentielle sensibilité : ’Le faible niveau de bruit ajouté par les vibrations moléculaires durant le processus de conversion permet la détection de signaux extrêmement faibles à température ambiante. À l’aide de dispositifs avancés, nous envisageons d’atteindre la limite quantique de conversion et d’avoir l’opportunité exceptionnelle de résoudre le signal de quanta unique de lumière infrarouge’.
L’étude de l’EPFL inspirera de futurs travaux à la frontière entre la science des surfaces, la nanotechnologie et l’optique quantique qui favoriseront le développement de nouveaux ayant des applications dans la détection et l’imagerie infrarouge.