Les réseaux transnationaux, tels que les Frères musulmans nés en Egypte ou la Ligue islamique mondiale (LIM) financée par l’Arabie saoudite, ont joué un rôle important dans la création et la mise sur pied de plusieurs mosquées et associations musulmanes. Ils ont cependant moins pris pied en Suisse que dans d’autres pays et y ont même perdu de leur influence ces dernières années, comme le révèle une nouvelle étude du Centre Suisse Islam et Société (CSIS).
L’étude explore, pour la première fois, le lien entre les relations transnationales et les réseaux locaux, en mettant l’accent sur les communautés musulmanes arabophones en Suisse. Selon la conclusion de l’étude, des associations faîtières organisées au niveau cantonal occupent désormais des fonctions de représentation importantes vis-à-vis des milieux politiques, des médias, des Eglises et de la société.
Accent sur la réalité de la vie en Suisse Dans un premier temps, l’étude menée par Hansjörg Schmid, Noemi Trucco et Federico Biasca, analyse de façon exemplaire le débat politique et de l’espace médiatique, qui attribue souvent un rôle central à l’influence présumée de l’étranger. Sur la base de récentes recherches, elle présente ensuite quatre réseaux transnationaux musulmans et leur influence en Occident: les Frères musulmans, Tablighi Jamaat, l’Association des projets de bienfaisance islamiques (Al-Ahbash) et le mouvement wahhabite. L’équipe constate de multiples processus d’adaptation liés à l’évolution du contexte. Suivent sept études de cas sur des communautés musulmanes majeures, notamment à Zurich, Bâle, Berne, Delémont, Lausanne et Genève. Sur la base de documents et de quelque 40 entretiens et consultations d’expert·e·s, l’étude explore la relation entre les influences extérieures et les réseaux locaux. Une grande partie des associations nées dans les années 1970 est désormais multilingue. Si certaines sont davantage tournées vers l’intérieur, d’autres entretiennent des relations étroites avec les autorités, les écoles et les Eglises. La grande mosquée de Genève est ainsi fortement imprégnée du contexte politique en Arabie saoudite, mais laisse néanmoins la place à des groupes de femmes et à un enseignement religieux axé sur la réalité de la vie en Suisse. L’exemple d’une mosquée à Zurich montre aussi une gestion transparente du financement par les Emirats arabes unis, émanant de relations d’hommes d’affaires.
Dynamisme et diversité L’étude met en évidence le fort dynamisme des organisations musulmanes. Les communautés musulmanes se sont diversifiées bien au-delà des réseaux transnationaux et ont développé des activités, telles que la formation, la direction de mosquées et l’accompagnement spirituel. Les réseaux transnationaux ne trouvent que partiellement leur place dans les dynamiques et les structures locales. L’étude réfute ainsi la vision générale d’un islam piloté par l’étranger en Suisse et démontre la nécessité d’une analyse minutieuse des relations transnationales, distinguant les dimensions personnelles, idéologiques et institutionnelles. Les débats de société et la politique des cantons en matière de religions ont par ailleurs une grande influence sur les communautés musulmanes.
A propos de l’étude L’étude a été financée par le Département fédéral des affaires étrangères (DFAE). Elle s’inscrit dans une série d’études du CSIS sur les imams et les communautés musulmanes en Suisse. Le CSIS est un centre interfacultaire des Facultés des lettres et des sciences humaines, de droit et de théologie de l’Université de Fribourg. Sa fondation en tant que centre de compétences suisse en 2015 est le fruit d’un processus de discussion de plusieurs années mené au niveau fédéral.
Lien vers l’étude: https://folia.unifr.ch/unifr/documents/313356
Image: Grande Mosquée de Genève
Baisse des influences étrangères dans les communautés musulmanes
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