Poussière d’étoiles

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Pointues : Les étoiles en nanocéramique traversent la peau. Image : Empa
Pointues : Les étoiles en nanocéramique traversent la peau. Image : Empa

Les maladies de peau très répandues comme le psoriasis ou la névrodermite sont difficiles à traiter. Des chercheurs de l’Empa ont trouvé une solution innovante en collaboration avec un partenaire industriel : Des étoiles en nanocéramique placent de minuscules plaies sur la peau et permettent à des molécules d’acide nucléique d’atteindre leur lieu d’action.

Lorsque les scientifiques des matériaux regardent les étoiles, ils peuvent dans certaines circonstances reconnaître l’avenir - et ce, lorsqu’il s’agit d’étoiles en nanocéramique. Des chercheurs de l’Empa à Dübendorf et à Thoune développent, en collaboration avec le partenaire industriel Aldena Therapeutics, des procédés de traitement innovants pour des maladies de peau très répandues. L’équipe mise sur des étoiles nanocéramiques qui « vont à travers la peau ». Le projet est soutenu par Innosuisse.

Le problème : les substances actives modernes ne pénètrent pas assez profondément dans les couches cutanées concernées lorsqu’elles sont appliquées dans des pommades ou des lotions traditionnelles. Mais si l’on pouvait rendre la peau perméable à court terme, les grosses molécules à effet thérapeutique pourraient être acheminées jusqu’à leur cible. Les molécules siRNA, abréviation de « small interfering RNA », sont par exemple utilisées pour de nouvelles thérapies. Ces molécules peuvent aider à réguler la production de protéines grâce à des interactions ciblées avec l’ARN messager (ARNm) propre au corps. Elles peuvent ainsi intervenir dans les processus pathologiques et bloquer les processus nocifs. Des médicaments dotés de ce principe d’action existent déjà pour certains troubles métaboliques et maladies héréditaires.

Pour utiliser de tels siRNA dans des thérapies modernes, Aldena Therapeutics, dont le siège se trouve à Boston, Londres et Lausanne, cherchait un procédé efficace pour faire pénétrer des substances actives dans - ou plutôt sous - la peau. Les chercheurs de l’Empa Michael Stuer du laboratoire « High Performance Ceramics » et Patrick Hoffmann du laboratoire « Advanced Materials Processing » ont donc utilisé des nanocéramiques composées de particules d’oxyde d’aluminium pour en faire une forme tridimensionnelle à arêtes vives. Après le frittage, ils ont ainsi obtenu des étoiles à trois branches d’un diamètre d’environ 0,8 millimètre, qui permettent d’ouvrir temporairement la barrière cutanée aux molécules de siRNA. « Ces étoiles 3D aux bras effilés créent des micro blessures dans la peau qui se referment rapidement d’elles-mêmes », explique Michael Stuer. Il reste toutefois suffisamment de temps pour que les molécules actives puissent pénétrer dans la peau.

Dans le cadre du projet « StarCURE », l’équipe de l’Empa est parvenue à fabriquer des étoiles bombées selon un angle précis. De cette manière, les étoiles « roulent » sur la peau lors de l’application, s’inclinent rapidement et créent ainsi plus de micro ouvertures dans la peau que des structures planes. Les étoiles en nanocéramique sont appliquées dans un gel. Quelques secondes après l’application sur la peau, le gel est déjà retiré. Michael Stuer, qui a lui-même testé le gel étoilé, confirme les dires des personnes qui l’ont essayé jusqu’à présent : « On a l’impression d’un gommage de la peau ».

Un processus de fabrication rentable a également été déterminant pour l’utilisation en tant que thérapie. En effet, si les étoiles devaient être produites au laser, le prix de fabrication ne permettrait pas d’obtenir un produit viable. Les chercheurs de l’Empa ont donc développé sans hésiter des moules en polymère qui permettent de produire de grandes quantités beaucoup plus rapidement et plus facilement. Grâce à ce processus de mise à l’échelle industrielle, il est possible de réduire considérablement les coûts de fabrication. Les chercheurs ont récemment déposé une demande de brevet pour ce procédé.

Mais Empa et Aldena Therapeutics veulent aller encore plus loin : Dans une prochaine étape, Michael Stuer souhaite modifier la recette pour que les étoiles en nanocéramique deviennent biodégradables ou se décomposent en poussière après utilisation. Le matériau céramique actuel pourrait à l’avenir être lié à un biopolymère ou remplacé par un bioverre. Cela permettrait d’élargir considérablement le champ d’application. « Les patientes et les patients pourraient simplement laver les étoiles thérapeutiques après l’application », explique Michael Stuer.

Enfin, le champ d’application ne se limite pas aux maladies de la peau. Un exemple : jusqu’à 30 pour cent des enfants et des jeunes adultes souffrent de phobie des seringues. Le fait d’administrer un produit par injection aux personnes concernées provoque chez elles une grande angoisse pouvant aller jusqu’à l’évanouissement. Dans le quotidien médical, cela représente un défi pour toutes les personnes concernées. Pour ces personnes aussi, les étoiles en nanocéramique pourraient être une bonne solution pour recevoir facilement et sans piqûre les médicaments ou les vaccins nécessaires, selon le chercheur de l’Empa.

Les affections cutanées chroniques

Les maladies chroniques de la peau que sont le psoriasis, l’eczéma, la dermatite atopique, le vitiligo ou la maladie des taches blanches et l’alopécie circulaire (alopecia areata) sont très répandues et difficiles à traiter. La cause de ces affections n’est pas toujours entièrement élucidée. Outre les prédispositions héréditaires, les expositions environnementales induisent des processus inflammatoires dans la peau, ce qui entraîne les symptômes suivants. Selon le tableau clinique, on observe des rougeurs, une desquamation ou une perte de pigments et de cheveux. Selon leur degré de gravité, ces affections peuvent réduire considérablement la qualité de vie des personnes concernées.