Le twirling bâton, un sport populaire et local, est très peu connu du grand public. Pratiqué essentiellement par des femmes et des fillettes, il découle en quelques sortes des majorettes et emprunte à plusieurs disciplines ’cousines’ comme la danse, la gymnastique, ou encore le patinage artistique.
Discipline populaire
Pour expliquer comment son choix s’est porté sur cette pratique sportive pour mener sa thèse financée par le FNS ainsi que la HES-SO domaine travail social et sous la direction des professeur-e-s Dominique Malatesta et Christophe Jaccoud, Shia Manh Ly détaille : ’Certains éléments centraux dans les clubs de twirling bâton présentaient une résonnance pour moi, à savoir la traditionnalité du féminin, l’entraide et le partage. Ces différentes valeurs m’ont intéressée et m’ont donné envie de creuser le sujet d’un point de vue scientifique. Je suis issue de la migration et d’un milieu populaire. J’ai grandi en Suisse romande, mon papa est Vietnamien et ma maman, Chinoise. J’ai appris le cantonais, qui est la langue de ma maman’.Au niveau méthodologique, la sociologue a emprunté à d’autres disciplines, notamment à l’ethnographie, en réalisant durant plusieurs années de l’observation participante au sein de trois clubs de twirling bâton. Pour compléter sa démarche scientifique, Shia Manh Ly a mené des entretiens individuels avec des membres adultes faisant partie de l’encadrement, ainsi que des entretiens collectifs avec des enfants. ’Je me suis intéressée tant aux enfants qu’aux adultes, à la fois dans leurs gestes et leurs paroles’.
Comment se forgent les opinions
La chercheuse poursuit : ’Les institutions reposant sur le loisir organisé, par exemple les clubs de sport, qui sont très implantés en Suisse, méritent l’attention des scientifiques, tout particulièrement dans une perspective de production d’identités sociales affirmatives. L’engagement au sein d’associations éclaire les rapports entre la société civile et les institutions. J’ai cherché à ouvrir une réflexion sur la vie associative et sur la manière dont une activité sportive, ici le twirling bâton, peut-être l’espace-temps d’une production du politique’. Ou comment le fait d’être membre d’une société sportive locale permet de développer sa capacité de réflexion sur soi-même ainsi que son interprétation du monde. Ceci permettant d’aboutir à une compréhension de la société.Par exemple, la chercheuse a pu observer les fillettes ajuster leur comportement lorsque les exigences liées à la pratique du twirling bâton s’élevaient. ’Ces jeunes filles ont développé des stratégies pour s’adapter aux obstacles. Un autre aspect très central dans le twirling bâton est la lutte permanente pour la survie du club. Les membres luttent constamment pour obtenir une certaine reconnaissance et sont en recherche constante de matériel et de salles. Il existe une certaine fragilité et un espoir de reconnaissance, souvent déçu, car la discipline est peu connue du public, populaire et pratiquée par des femmes’.