Depuis le 17 juin, des étudiants de l’EPFL et de 12 universités européennes sont réunis à Zermatt pour monter et présenter au public un habitat lunaire dans le cadre du projet IGLUNA. Cet habitat dans la glace devrait permettre à l’être humain de vivre sur la lune.
Le 20 juillet 1969, nous faisions un pas sur la Lune pour la première fois. Cinquante ans plus tard, nous pensons à y poser nos valises. Coordonné par le Swiss Space Center de l’EPFL dans le cadre de l’ [email protected] , un projet pilote de l’Agence Spatiale Européenne (ESA), IGLUNA rassemble plus de 150 étudiantes et étudiants de multiples disciplines autour d’une seule et même thématique: «un habitat dans la glace», potentiellement viable sur la Lune.
L’année académique 2018/2019 était consacrée à la conception de technologies pouvant répondre aux challenges humains et technologiques que représente la vie humaine dans un environnement extrême: structure de l’habitat, production d’oxygène, de nourriture et d’électricité, recherche, communication, santé et bien-être.
Destination Zermatt
Depuis le 17 juin, les équipes impliquées ont investi Zermatt pour leur campagne de terrain. «Les étudiants collaborent énormément entre eux. Ils mettent en commun leurs différents modules et concepts qui, bout-à-bout, donnent une vision de la façon dont on pourrait vivre sur la Lune», explique Tatiana Benavides, responsable du projet au Swiss Space Center.
Les projets conceptuels et artistiques ont été installés à la galerie d’art Vernissage du Backstage Hotel, et les projets scientifiques et techniques ont été montés dans le palais de glace du Matterhorn glacier paradise. Le public est invité à découvrir ces deux lieux d’exposition jusqu’au 30 juin. «En plus de présenter leurs projets, les participants testent l’habitat, les robots, vérifient si les plantes poussent, procèdent à leurs expériences scientifiques... Ils sont dans des conditions réelles, même s’ils ne dorment pas dans le glacier!», s’enthousiasme Tatiana Benavides.
L’EPFL veut décrocher la lune
Côté EPFL, c’est un mélange d’étudiants issus de plusieurs facultés qui mettent la main à la pâte depuis septembre. A 3’883 mètres d’altitude, à 15 mètres sous la surface du glacier du Petit-Cervin, l’équipe de Pierre Zurbrügg, architecte et chargé de cours à l’EPFL, a monté la pièce maitresse du projet: l’habitat. Cet igloo, fait à base de matériaux portants et isolants, a été pensé et construit par des étudiants en architecture, génie civil et sciences de l’environnement prenant part à l’Unité d’Enseignement ENAC «Habiter Mars». «Nous devions proposer une structure pouvant répondre aux différentes contraintes posées par IGLUNA, dont le transport du matériel, le temps restreint pour le montage et l’environnement à -4°C», indique Pierre Zurbrügg. «L’igloo est fait de briques pouvant s’assembler assez facilement, ce qui nous a permis de monter le tout en trois jours.»
Et à l’intérieur de cet habitat, à quoi ressemblerait le quotidien? «Notre équipe a réfléchi au support vie, car il ne suffit pas d’un espace qui permette de survivre, mais aussi de vivre», ajoute Pierre Zurbrügg. Ainsi, l’idée est d’utiliser tous les éléments à disposition au sein de l’habitat - les plantes, les êtres humains et leurs métabolismes respectifs - pour créer un cycle de vie et limiter le gaspillage. Ils ont également modélisé en 3D un habitat spatial entier afin d’illustrer les différentes ambiances d’un tel environnement sous forme d’images de synthèses et d’une animation interactive.
L’équipe de GrowbotHub, un projet conjoint entre l’EPFL et l’UNIL mis en place par l’association Légumes Perchés, a étudié la production de nourriture en concevant un système entièrement automatisé pour cultiver et récolter des fruits et des légumes dans des conditions extrêmes. «De notre côté, nous montons la structure et mettons en place le robot au sein de l’habitat. L’équipe de Zürich (SWAG) avec qui nous collaborons se charge des systèmes aéroponiques et de la culture sur sol lunaire et de leur entretien», explique Victoria Letertre, étudiante en Robotique à l’EPFL et programmeuse du robot.
Bien d’autres aspects de la vie lunaire ont été pensés par l’EPFL. Une scie pour découper dans la glace a été fabriquée avec la technique 3D - Laser Shock Peening, développée au Laboratoire de métallurgie thermomécanique. Grâce à des caméras installées dans l’habitat, un autre projet développé au Swiss Space Center en collaboration avec le Laboratoire de vision par ordinateur de l’EPFL vise à analyser les comportements humains à l’intérieur de l’igloo grâce à des algorithmes de capture de mouvements. Ainsi, des recommandations générales pour améliorer la conception de l’habitat et la sécurité de ses occupants pourront être formulées.
«Nous voulons explorer l’espace, car nous sommes de nature curieuse et nous souhaitons toujours repousser les frontières de nos connaissances. Vivre sur la Lune est un véritable challenge. Les étudiants ont développé des technologies uniques pouvant également avoir une application sur Terre, dans des environnements extrêmes ou suite à des catastrophes naturelles par exemple», précise Tatiana Benavides.
En parallèle à la finalisation d’IGLUNA 2019, le Swiss Space Center se prépare pour la deuxième édition de ce projet interdisciplinaire. «Nous avons appris beaucoup de choses, tant au niveau humain qu’au niveau technologique. Quelques-unes des équipes ont décidé de continuer l’année prochaine afin d’améliorer leur prototype. Pour le reste, nous attendons de recevoir des propositions de projets», confie Tatiana Benavides. L’appel à projets pour IGLUNA 2020 est ouvert jusqu’au 21 juillet 2019.
«IGLUNA, est une aventure qui me tient beaucoup à coeur. Programmer un robot qui, un jour peut-être ira sur la Lune, c’est un rêve qui devient réalité. Et si un jour j’ai la chance d’être envoyée en mission dans l’espace, j’irai sans aucune hésitation!», s’exclame Victoria Letertre
Une mission lunaire dans la glace à Zermatt
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